Normes du travail au Québec et faute grave : peut-on congédier sans préavis une employée au comportement inacceptable?
Cas réel :
Un employeur (régi par les normes provinciales du Québec) m’appelle, inquiet. Une nouvelle employée, en poste depuis à peine 4 mois, pose déjà de sérieux problèmes.
Elle fait preuve d’insubordination grave et répétée, tient des propos agressifs et violents verbalement envers son employeur puis refuse de se conformer aux directives de l’employeur, et elle a dû être rencontrée plusieurs fois dans un moment restreint, cependant rien ne semble s’améliorer.
La question est simple :
Peut-on la congédier? Et si oui, avec ou sans préavis?
Résumé légal : préavis de cessation d’emploi au Québec
Lorsqu’un employeur souhaite mettre fin à l’emploi d’un salarié, il est généralement tenu de lui remettre un avis écrit de cessation, selon les articles 82 et 82.1 de la Loi sur les normes du travail (LNT).
Durée du préavis exigée selon l’ancienneté :
Moins de 1 an de service continu → 1 semaine
1 à 5 ans → 2 semaines
5 à 10 ans → 4 semaines
10 ans et plus → 8 semaines
Exceptions où l’avis n’est pas requis (art. 82.1) :
L’employeur n’a pas à donner de préavis si :
L’employé a moins de 3 mois de service continu;
L’employé travaille sous un contrat à durée déterminée ou pour une tâche spécifique qui se termine;
L’employé a commis une faute grave;
La fin d’emploi est causée par un cas de force majeure (ex. incendie, sinistre).
Qu’est-ce qu’une faute grave?
Une faute grave est un manquement sérieux et inexcusable qui justifie une rupture immédiate du lien d’emploi, sans préavis ni indemnité.
Selon les tribunaux, une faute grave :
· Constitue une violation majeure des obligations professionnelles;
· Brise le lien de confiance entre l’employeur et l’employé;
· Rend la poursuite de l’emploi impossible.
Elle peut justifier un congédiement sans avertissement préalable, mais l’employeur doit être en mesure de prouver la gravité de la situation, c’est ce qu’on appel le fardeau de preuve.
Exemples de fautes graves pouvant justifier un congédiement immédiat (art. 82.1(3) LNT)
Selon la jurisprudence québécoise, certains comportements sont généralement reconnus comme constituant une faute grave, permettant à l’employeur de mettre fin à l’emploi sans préavis ni indemnité. En voici des exemples courants :
· Commettre un vol ou un acte frauduleux dans le cadre de ses fonctions;
· Utiliser à des fins personnelles les biens fournis par l’employeur, en contradiction avec les règles internes;
· S’approprier ou retirer des documents confidentiels ou sensibles appartenant à l’entreprise;
· Transférer, détourner ou solliciter la clientèle de l’employeur au profit d’un compétiteur;
· Tenir des propos discriminatoires ou à caractère raciste envers d’autres membres du personnel;
· Accumuler des absences non justifiées ou abusives sans fournir de motifs valables;
· Faire preuve d’insubordination importante, refusant d’obéir aux consignes;
· Adopter des comportements portant atteinte à la dignité ou à l’intégrité des collègues;
· Fournir de fausses informations au moment de l’embauche;
· Déclarer du temps non travaillé (vol de temps);
· Refuser délibérément de respecter les instructions ou politiques de l’entreprise;
· Manquer à son devoir de loyauté, notamment en nuisant aux intérêts de l’employeur.
Fardeau de preuve en cas de congédiement sans préavis
Lorsqu’un employeur met fin à l’emploi sans préavis, c’est à lui de justifier sa décision.
Série de manquements répétés :
L’employeur doit démontrer une gradation des sanctions :
Avertissements donnés;
Suivis documentés;
Occasion réelle donnée à l’employé de s’améliorer.
👉🏻 Sans cette gradation, le congédiement pourrait être jugé injustifié.
Faute grave unique :
Si l’employeur invoque une faute grave isolée, il doit prouver que :
La faute est suffisamment sérieuse pour rompre immédiatement le lien d’emploi;
Le geste commis rend la poursuite de l’emploi impossible.
👉🏻 Dans ce cas, la gradation des sanctions n’est pas nécessaire — mais la preuve de la gravité est essentielle.
En résumé :
Le fardeau de preuve repose toujours sur l’employeur. Il doit démontrer que le congédiement immédiat est justifié et proportionnel.
Peut-on la congédier et sans préavis dans ce cas?
Oui, mais…
L’article 82.1 de la LNT prévoit qu’en cas de faute grave, aucun préavis n’est requis. Le comportement décrit ici — insubordination répétée, violence verbale, refus d'obéir aux directives — constitue une faute grave et même un motif sérieux de congédiement selon l’article 2094 du Code civil du Québec.
Cela dit :
Le congédiement ne doit pas être discriminatoire ou fait pour un motif illégal
Il ne doit pas être abusif, ni fait de façon humiliante ou impulsive
Conclusion
Dans le cas présenté, le comportement de l’employée — insubordination persistante, agressivité verbale et refus d’obéir aux directives — constitue une faute grave au sens de la Loi sur les normes du travail.
Combiné à un dossier bien documenté démontrant l’inefficacité des interventions précédentes, le congédiement immédiat sans préavis est non seulement possible et juridiquement justifiable.
⚠️ Toutefois, chaque situation doit être évaluée avec rigueur. Un congédiement mal encadré, même en présence de fautes graves, peut entraîner des recours ou des plaintes.
Vous hésitez sur la marche à suivre dans une situation similaire? Je peux vous aider à poser les bons gestes, au bon moment, dans le respect des lois.
Contactez-moi : http://www.mbservicesconseilsrh.com/contact